En ce 8 mars 2021, la question du droit des femmes, et de leur protection en cas de violences conjugales, est plus que jamais au centre de toutes les préoccupations.
L’épidémie de covid-19, et en particulier les périodes de « confinement » successives imposées par le gouvernement, ont mis en évidence une augmentation des violences domestiques.
En moyenne, le nombre de femmes âgées de 18 à 75 ans qui, au cours d’une année, sont victimes de violences physiques et/ou sexuelles commises par leur conjoint ou ex-conjoint, est estimé à 213 000 femmes.
L’auteur de ces violences est le mari, le concubin, le pacsé, le petit-ami, ancien ou actuel, cohabitant ou non.
Ces chiffres ont connu une forte augmentation depuis le début de la crise sanitaire liée à l’épidémie de covid-19 (+ de 30 %).
Il parait ainsi plus que jamais important de rappeler que l’Etat a mis en place un certain nombre de mesures, notamment en matière de bail d’habitation, permettant aux femmes victimes de violences conjugales – physiques, verbales, psychologiques et/ou sexuelles – de quitter plus « facilement » le domicile conjugal.
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Victimes de violences conjugales : les dispositifs permettant de quitter le logement plus « facilement »
La loi du 23 novembre 2018 dite « loi ELAN » a, en effet, instauré un dispositif permettant aux locataires, victimes de violences conjugales, de quitter leur logement sans craindre la moindre représaille de la part de leur bailleur.
La loi du 30 juillet 2020 est venue compléter ce dispositif en instaurant un nouveau cas de préavis réduit.
Qui peut bénéficier d’un délai réduit de préavis ?
Préavis réduit. En principe, le délai de préavis en matière de bail d’habitation est de trois mois.
Jusqu’à la loi du 30 juillet 2020, il n’existait aucune disposition spécifique en cas de violences conjugales. Les seules exceptions prévues étaient limitées à l’obtention ou la perte d’un emploi, l’état de santé du locataire ou encore aux faibles ressources de ce dernier.
La loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 a réduit le délai de préavis à un mois en cas de congé délivré par une personne victime de violences conjugales.
L’article 15-I de la loi du 6 juillet 1989 prévoit désormais :
« Lorsqu’il émane du locataire, le délai de préavis applicable au congé est de trois mois.
Le délai de préavis est toutefois d’un mois […) pour le locataire bénéficiaire d’une ordonnance de protection ou dont le conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin fait l’objet de poursuites, d’une procédure alternative aux poursuites ou d’une condamnation, même non définitive, en raison de violences exercées au sein du couple ou sur un enfant qui réside habituellement avec lui ».
Dorénavant, toute femme, victime de violences conjugales, peut quitter les lieux loués dans le délai d’un mois (comme c’est déjà le cas en zone tendu ou en cas de perte d’emploi).
Fin de la solidarité entre les locataires
Pour ce faire, la locataire devra justifier soit d’une ordonnance de protection à son bénéficie soit qu’elle apporte la preuve que son conjoint, pacsé ou encore concubin a fait l’objet de poursuites pénales pour des faits de violence.
Fin de la solidarité pour le locataire victime de violences. L’article 136 de loi ELAN a créé une exception à la solidarité en matière de bail d’habitation en raison de violences conjugales.
L’article 8-2 de la loi du 6 juillet 1989 prévoit, en effet, que :
« Lorsque le conjoint du locataire, son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou son concubin notoire quitte le logement en raison de violences exercées au sein du couple ou sur un enfant qui réside habituellement avec lui, il en informe le bailleur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, accompagnée de la copie de l’ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales dont il bénéficie et préalablement notifiée à l’autre membre du couple ou de la copie d’une condamnation pénale de ce dernier pour des faits de violences commis à son encontre ou sur un enfant qui réside habituellement avec lui et rendue depuis moins de six mois.
La solidarité du locataire victime des violences et celle de la personne qui s’est portée caution pour lui prennent fin le lendemain du jour de la première présentation du courrier mentionné au premier alinéa au domicile du bailleur, pour les dettes nées à compter de cette date. ».
Le dernier alinéa de l’article 8-2 énonce, par ailleurs, que :
« Le fait pour le locataire auteur des violences de ne pas acquitter son loyer à compter de la date mentionnée au deuxième alinéa est un motif légitime et sérieux au sens du premier alinéa de l’article 15 ».
L’article 8-2 de la loi du 6 juillet 1989 crée donc une exception au principe de solidarité, souvent prévu dans le cadre d’un bail d’habitation.
Désormais, toute femme, locataire, mariée ou non, liée ou non par un PACS, qui souhaite quitter les lieux pour violences conjugales pourra bénéficier de cette mesure.
Quelles sont les démarches ?
Toutefois, cette mesure n’a pas, pour l’heure, un caractère automatique.
Pour en bénéficier, la locataire devra en informer son bailleur (soit directement soit par l’intermédiaire du mandataire en charge de la gestion du bien) par lettre recommandée avec accusé de réception, en y joignant :
- Soit une copie de l’ordonnance de protection délivrée par le juge aux affaires familiales ;
- Soit une copie de la condamnation pénale de son conjoint ou partenaire pour des faits de violences conjugales
Le locataire auteur des violences conjugales resté dans les lieux est-il redevable des loyers ?
La solidarité aux dettes liées aux loyers et charges prend fin le lendemain du jour de la première présentation de ce courrier au domicile du bailleur. La caution se trouvera elle aussi libérée de ses obligations vis-à-vis du bailleur à compter de cette date.
Le locataire, auteur des violences, restera ainsi redevable seul des loyers et charges à compter de cette date.
En cas de non-paiement de l’entier loyer par ce dernier, à compter de la notification faite par la victime de violence au bailleur, le Bailleur pourra mettre fin au bail dans les conditions de l’article 1er de l’article 15, le non-paiement du loyer constituant un motif légitime et sérieux de résiliation.
Ces mesures, qui sont loin d’être parfaites, ont au moins le mérite d’exister. Ces mesures permettent d’inciter les femmes, victimes de violences conjugales, à s’éloigner de leur conjoint, compagnon ou partenaire violent ; étant également rappelé que ces femmes, qu’elles soient locataires (ou propriétaires d’ailleurs), bénéficient d’une priorité en cas de demande d’attribution d’un logement social.
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